Valorisés au travail Spécial
Travailler moins pour gagner autant: qui refuserait? C’est ce que suggèrent les partisans de la semaine de quatre jours: trente-deux heures payées à 100%. Alors que de plus en plus d’entreprises offrent la possibilité de faire du télétravail et d’aménager ses horaires à sa guise, certains la considèrent comme le nouveau moyen d’attirer des talents.
Le jour de congé supplémentaire n’en est pas moins un faux cadeau: le chef d’entreprise qui se lance dans cette aventure s’attend à ce que ses employés, supposés plus reposés, valorisés et heureux, soient aussi plus productifs. Loin d’être un acte désintéressé, il demande un retour sur investissement. Une belle carotte qui cache aussi ses côtés sombres: une flexibilité réduite dans le choix de ses vacances, par exemple, ou le risque d’une intensification du travail.
L’expérience, encore balbutiante, en particulier en Suisse, manque de cas pratiques pour qu’on puisse en tirer de grandes vérités. La semaine de quatre jours a toutefois le mérite de nous interroger sur notre rapport au travail: ce modèle laisse à penser qu’il serait ce lieu pénible, selon une vision biblique – «J’ai vu la besogne que Dieu impose aux fils d’Adam pour les tenir en haleine», dit l’Ecclésiaste (3, 10) –, où l’on veut passer le moins de temps possible. Comme s’il ne devait répondre qu’à la nécessité de nourrir sa famille et de s’acquitter de ses factures.
Le jour de congé supplémentaire n’en est pas moins un faux cadeau.
Or, elle se heurte à un concept très actuel: la recherche du sens dans le travail. Et cela quel que soit le nombre d’heures qu’on y passe. Les employés d’une librairie romande, après avoir testé la semaine de quatre jours durant un an, exprimaient leur désir de se sentir plus utiles, responsabilisés et valorisés. Peut-être gagnerait-on en priorité à améliorer les conditions de travail en réduisant par exemple le nombre de séances, en misant sur la confiance et l’expérience plutôt que sur les audits et autres règles administratives parfois absurdes, en favorisant les échanges humains et la stimulation intellectuelle. Pour que chacun trouve sa place et se sente vraiment valorisé.
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