8e édition d’Il est une foi Spécial
Le miracle se retrouve au cœur du festival Il est une foi, le rendez-vous cinématographique de l’Eglise catholique à Genève. Du 3 au 7 mai, cette 8e édition convie à une réflexion sur l’émerveillement religieux à travers une programmation riche, des débats et des invités.
Les miracles sont-ils un reflet de nos espoirs et de nos rêves? Ces événements qui défient la logique et les lois de la nature n’ont cessé d’inspirer les réalisateurs. Il n’est donc pas étonnant que le rendez-vous cinématographique de l’Eglise catholique romaine de Genève, festival dédié aux questions religieuses, s’empare de ce thème. Au préalable, il convient toutefois de se mettre d’accord sur une notion sujette à diverses interprétations.
«Le miracle cinématographique se limitera à la définition stricte de phénomènes inexplicables qui semblent attester de l’intervention d’une force supérieure, peut-être de nature divine», expliquent Bertrand Bacqué, directeur artistique du festival, et Norbert Creutz, membre du comité et critique de cinéma au journal Le Temps. Pas question donc de considérer le fantastique et tout ce qui sort des sentiers battus, mais bien la rupture dans le cours naturel des choses. Le miracle peut ainsi prendre la forme d’un heureux hasard, d’une guérison mystérieuse ou d’une apparition céleste. Il brouille la frontière entre le sacré et le profane en insérant de l’extraordinaire dans l’ordinaire.
Le meilleur moyen de représenter le miracle?
Dès sa naissance, le cinéma n’a eu de cesse de surprendre le spectateur et de l’émerveiller en lui montrant l’inconnu. Difficile de ne pas faire le rapprochement avec le miracle, qui suscite l’étonnement lui aussi. Aux trucages des précurseurs comme Georges Méliès, Fritz Lang ou Cecil B. De Mille succède une représentation qui s’éloigne des seuls effets spéciaux, davantage ancrée dans le réalisme.
«Le cinéma ouvre l’œil vers l’invisible et le hors-champ», développe Norbert Creutz, qui voit un avantage aux multiples points de vue du médium apportant subtilité et doute. Dans son ouvrage Cinémiracles. L’émerveillement religieux à l’écran, Timothée Gérardin insiste sur la prédisposition du cinéma à montrer le miracle mieux que les autres arts. «Le miracle ne peut être représenté que comme un point de rupture dans un univers ressemblant à la réalité», affirme le critique de cinéma, qui accompagnera cette 8e édition d’Il est une foi.
Au-delà des représentations spectaculaires, comme la traversée de la mer Rouge dans Les Dix commandements (projection le 7 mai à 9h30), Timothée Gérardin recense trois caractéristiques du miracle dans le septième art. Tout d’abord, l’importance accordée au regard des témoins, un principe que l’on retrouve dans le chef-d’œuvre danois Ordet de Carl Theodore Dreyer (3 mai à 14h30). Ensuite, la tension entre un individu et la communauté. Finalement, en montrant des phénomènes inexplicables, «le miracle pose la question du sens» en justifiant l’acte de foi ou en critiquant son côté irrationnel.
Un ancrage chrétien
La majorité des 28 films projetés dans le cadre du festival possèdent un cadre judéo-chrétien. Un choix délibéré? «Notre définition du miracle est fortement liée à notre culture. Il était difficile de proposer des films qui sortent de ce cadre», précise Norbert Creutz. La tradition chrétienne est sans doute celle où l’idée de miracle a été la plus prégnante et la plus riche, continue de son côté Timothée Gérardin.
Cela n’a pas empêché le comité d’Il est une foi de programmer des œuvres qui s’intéressent à l’envers du miracle, soit aux interventions de son pendant maléfique, le diable. Un sujet qui domine le film d’horreur américain depuis L’Exorciste de William Friedkin, le grand choc en 1973. Le film d’ouverture, Miracle en Alabama, d’Artur Penn (3 mai à 13h), va lui aussi à l’encontre du critère religieux avec un miracle laïc obtenu par la foi inébranlable en ses vertus.
Il ne s’agit toutefois pas de réduire la notion de miracle au cinéma aux seuls films consacrés au sacré. Le propre du miracle est de survenir dans un contexte profane ou un ordre naturel donné pour bouleverser le pacte de foi sur lequel repose l’œuvre. Bien qu’agnostique, le cinéaste français Cédric Kahn ne cesse d’interroger la mystique, la foi et l’amour dans La Prière (3 mai à 19h45). Tout en laissant le soin au spectateur de croire ou non en la perspective d’une intervention divine.
On le voit, les miracles créent tout un champ de possibles. Ils posent davantage de questions qu’ils n’apportent de réponses. Et ils restent plus que jamais d’actualité en continuant de fasciner les réalisateurs, comme l’attestent les nombreux films présentés au festival durant la dernière décennie.
Steven Wagner
Diversité de genres
Le festival Il est une foi, ou les Rendez-vous Cinéma de l’Eglise catholique romaine de Genève, mêle projections de classiques et débats qui interrogent le sens ainsi que la signification du miracle. Le festival genevois présente avant tout des œuvres qui touchent aux questions de société, à la dimension humaine et à la spiritualité afin d’inviter croyants, agnostiques et athées à dialoguer. Tous les films sont à voir aux Cinémas du Grütli à Genève (16, rue du Général Dufour). Une conférence inaugurale gratuite et sur inscription aura lieu au Centre de l’Espérance (8, rue de la Chapelle) le 1er mai à 19h30.
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